Alain FOUREZ est un Blainvillais de 65 ans, il habite la commune depuis 1998. Retraité de France Télécom, où il travaillait au service communication notamment à l'élaboration du journal d'entreprise, il devient le correspondant local pour le journal Ouest France en 2001. Cette opportunité lui permet d'exploiter ce qu'il aime et privilégie le rapport humain. Alain choisit ses sujets d'articles et désormais ses préférés sont les portraits de personnes qui ont, font des choses (extra)ordinaires, même toutes petites ...Il a éffectué ses interviews auprès de personnes habitant ou étant originaires de Blainville sur Orne. Ses articles sont parus dans le journal Ouest France à partir de la deuxième quinzaine de décembre 2008.
L'équipe de pilotage de "Blainville, là où j'habite!" a estimé qu'ils pouvaient s'intégrer totalement dans la démarche du projet.
Nous vous proposons de les retrouver lors de cette "expo virtuelle" sur ce blog, mais vous pouvez également les (re)découvrir à l'Espace Culturel Paul Eluard ... Bonne visite !!!
Que peut donc faire un photographe médical en dehors de son travail avec des feuilles d’acier ¸ "de la sculpture tout simplement ", répond Gérard lecornu, chaudronnier de son état, dessinateur par obligation, photographe de labo à l’université de médecine pour l’alimentation et artiste pour le plaisir.
Plus d’une trentaine d’œuvres sont sorties de sa cave, pardon de son atelier, en 25 ans. Un poisson : 120 heures de travail ; un hippocampe : 100 heures, des marques, des oiseaux, une raie manta… plein d’objets qu’il peine quelquefois à caser dans son pavillon ou chez ses enfants.
« en fait je ne suis pas sculpteur car je travaille différemment, selon ma propre inspiration. Je ne pars pas d’un volume pour arriver à l’œuvre mais j’accomplis l’inverse. C’est avec les feuilles d’acier que je soude, ou brase et que je donne le volume qui n’existait pas au départ. Souvent je pars d’un dessin pour avoir une vue sur plusieurs faces, de temps en temps une maquette en carton grandeur nature avant de passer à l’acier. » Des expos, il en fait, des prix, il en a eu mais il n’en parle pas beaucoup. C’est à la vue de son « book » que l’on apprend tout ça.
Une autre passion : l’aéromodélisme
Maintenant Gérard a 61 ans. Il est à la retraite et n’a plus une minute à lui. Une autre passion est en train de prendre le dessus : l’aéromodélisme. Après avoir tâté du pilotage en vrai, c’est en bordure de la piste de Rosel qu’il pilote ses avions de 2m d’envergure avec les copains. « ça revient quant même à moins cher mais on va moins loin. »
Il y a aussi le montage vidéo en informatique, des voyages et les petits-enfants. Tout ce qui occupe des grands-parents « gâteau ». Et les projets ? « Au point de vue sculpture, pour l’instant c’est calme mais ça va me reprendre un jour, c’est sûr. »
Jean-Pierre Jaussaud est encore dans la course .
Ce pilote caennais bien connu dans les années 1963 à 1985, est passé tout près d’une carrière en Formule 1. Un parcours atypique. Jean-Pierre Jaussaud a maintenant 71 ans. Ce caennais a piloté des engins de course dans les années 1963 à 1985. S’il a levé le pied dans les courses automobiles, il reste encore accroché des deux mains à son volant et n’hésite pas à faire des démonstrations. Retour sur une carrière qui aurait dû être bien différente. « Dès l’âge de 10 ans, j’avais une passion secrète, je voulais devenir coureur automobile. Seulement mon père me prévoyait une autre carrière. Directeur de l’entreprise Dumond-Jaussand, négociant en vin et épicier en gros, il voulait que je reprenne l’affaire après son départ. »
L’erreur du papa a été d’apprendre à conduire à son fiston très jeune, sur les pistes de l’aéroport de Carpiquet sur une Citroën 5CV « Trèfle ». L’idée de piloter est tenace et Jean- Pierre se défoule sur un kart et apprend les ficelles du métier qui lui serviront plus tard. La mécanique, il l’a dans la peau et obtient de son père, à 20ans, la responsabilité du parc camions de l’entreprise. Il gère aussi la fabrication de bouchons pour les bouteilles de vin de retour de consigne. La lecture de Sport auto change tout . Jean-Pierre tombe par hasard sur la revue spécialisée Sport Auto, ce qui le replonge aussitôt dans ses rêves. « Jim Russel, le pilote anglais proposait des stages de pilotage. J’ai été obligé d’emprunter de l’argent à mon frère et à ma secrétaire pour pouvoir m’inscrire. L’affaire était trop belle pour la manquer. » Il part donc en Angleterre avec son ami de karting, Jean-Claude Pallis, et découvre là-bas, à 25 ans, l’objet de ses rêves les plus fous, une monoplace Lotus 18 qu’il peut piloter !
« Après une brève prise en main, j’ai été plus rapide que les moniteurs sur le circuit. A la même époque, Jim Russel créait le circuit de Magny-Cours dans le Nièvre. Là aussi, j’ai été le plus rapide des 300 prétendants au « Volant Shell ». J’ai terminé vainqueur et j’ai gagné la monoplace Cooper BMC, le must en 1964.» Voiture qu’il ratatine rapidement sur le circuit de Monaco. Matra l’embauche et commence alors la ronde des circuits en Europe et en Amérique du sud en compagnie de Beltoise, Pescarolo et Servoz-Gavin. Tous sont devenus pilotes de F1. Sauf Jaussaud. Tout à fait capable, il était trop gentil et a laissé sa place à d’autres.
Le rêve de Formule enterré, le pilote se pose des questions sur la suite de sa carrière. La compétition le titille et il reprend la course en prototype. Il donne le meilleur de lui-même, gagne beaucoup de courses. La consécration vient avec deux victoires aux 24 heures du Mans et des podiums aux « Dakar». Désormais entré dans l’adolescence des seniors, le pilote de Matra, Renault, Tecno, Rondeau, Lola… Celui qui a tutoyé les étoiles dans les chicanes à plus de 380 km/h, décide d’arrêter sa carrière professionnelle en 1992.
Il reste actif en rallye ou en démonstration jusqu’en 2005. Enfin en retraite, il a tout le loisir de répondre à ses admirateurs qui lui écrivent toujours.
Georges Ben Ahmed est un homme discret. C’est pourtant lui la mémoire historique de Blainville et il n’en fait pas état. Il est né à Blainville le 11 Mai 1949, cité des Brandons, d’un père marocain et d’une mère bretonne. De ses parents, il a appris le courage et la ténacité.
Pour ce 6ème enfant, comme pour ses 13 frères et sœurs, il n’est pas question de faire des études. Georges Ben Ahmed ira jusqu’au CM2, d’abord dans un baraquement du parc du château Delory puis dans la toute nouvelle école Colbert. Avide de liberté et de grand air, il décide de devenir jockey. A Maisons Laffitte, il commence à rêver de devenir cravache d’or. Le travail est trop difficile, il abandonne et devient apprenti boulanger. « Mais me lever à minuit, ce n’était pas mon truc ! »
Des noms et des histoires sortent des cartons
Il bifurque vers l’horticulture, puis le bâtiment, il y restera jusqu’en 1992 non sans avoir changé 37 fois de patrons. « A l’époque, on en quittait un le vendredi pour en retrouver le lundi. C’était facile. » Un accident l’oblige à quitter brutalement ce métier. Nouveaux petits boulots à droite et à gauche avant de faire quelques remplacements à la Mairie, où il devient titulaire d’un poste en 1995.
Et un jour, alors qu’il nettoie les archives municipales, il se prend de passion pour l’histoire et la recherche. Il s’intéresse d’abord à Colbert, avec l’aide de Dr Bocquel de Beuville. Puis il passe à la vitesse supérieure. Des trésors sortent des cartons et des noms apparaissent.
D’abord les lieux : les chantiers navals où son père a travaillé, le train Decauville qui longeait le canal, la ferle Lepeltier du XVIème siècle, le grenier à sel, l’ancienne forge de la ferme Huard… Puis les gens : François de Colbert, descendant direct du ministre de Louis XIV, lui raconte son aïeul. A Paris, il rencontre aussi la Marquise de la Rochechouart de Mortemart, descendante du seigneur de Blainville.
Georges note, photocopie, archive. Il se déplace aux Archives Nationales et en Allemagne, il entasse, classe, il persévère. En 2002, il met à jour les restes d’un avion canadien, tombé pendant la guerre. Il se met en tête de retrouver la famille de l’aviateur et entre en contact avec son fils.
Il a accumulé tellement de documents qu’il se met à écrire un premier livre, édité à compte d’auteur « Blainville autrefois, de 1920 à 1965 ». L’ouvrage est vite épuisé car les blainvillais veulent connaître l’histoire de la commune. Il écrit un deuxième livre « Blainville pendant l’occupation ». Aux beaux jours, il partage sa passion au gré des visites commentées.
Georges Ben Ahmed quittera son poste de gardien du centre de loisirs dans quelques mois. Il se remettra alors la tête dans le passé pour continuer l’histoire de Blainville dans un 3ème ouvrage.
Jean-Pierre Samson, un bison en lutte contre les myopathies
Il emménage à Blainville en 1982 et crée la section hand-ball à l’USMB (Union sportive municipale). Puis il réintègre EDF-GDF pour un temps et devient responsable solidarité dans le département. « Ma passion, ce sont les autres », aime à dire Jean-Pierre l’humaniste. A vélo, il récolte les dons pour le Téléthon.
Sa rencontre avec Bernard-Barataud, à la Ferté-Macé, a été le déclencheur de son dévouement inaltérable en faveur des enfants myopathes. « Face aux hésitations des uns et des autres, j’ai décidé de partir seul chercher de l’argent dans toutes les unités EDF de la région. En quelques jours de circuit à VTT, en plein hiver, j’ai récolté 8 700F. » Cet argent, ce sont les heures supplémentaires ou de récupération des camarades. Là n’est pas sa seule réussite. «L’Hôpital c’est la vie », c’est lui aussi. Dans les mêmes conditions, il rapporte 250 000 F au CHU de Caen, pour les enfants malades. En 1999, EDF et sa fondation contactent le Bison. En 2000, il crée « le Fil de l’énergie », un rassemblement de cyclistes volontaires, qui parcourent plusieurs centaines de kilomètres pour récolter de l’argent dans les unités EDF. Le « Fil » a fait des petits : désormais, neuf Flèches cyclistes sillonnent la France, chaque première semaine de décembre. En 2006, année où Blainville a été ville ambassadrice grâce à lui et à son collègue Pierre Couespel, une moisson record a rapporté au Téléthon la somme d’1 million d’euros (500 000 € grâce aux Flèches et autant d’abondement de la part de l’entreprise). « Je sais que le a maladie, la pauvreté et bien d’autres maux sont vivaces. Mais j’aimerais entendre dire, « ça y est on a guéri cette p… de maladie génétique, grâce à la thérapie génique ».
Depuis plus de trente ans, Yannick a une idée en tête. Il veut faire du cinéma. Mais l’heure des choix, il suit les conseils de ses parents. « Ils me disaient : ce n’est pas pour toi, choisis-toi un vrai métier pour t’en sortir dans la vie ». Il s’oriente alors vers l’hôtellerie- restauration et entre en apprentissage dans un restaurant de Ouistreham. Il y reste pendant 3 ans.
Majeur, son diplôme de maître d’hôtel en poche, il décide de conquérir Paris et de devenir acteur. Avec quelques sous, il prend des cours de théâtre à droite et à gauche, notamment au célèbre cours Florent. Mais ses maigres économies s’épuisent vite. Le voici stewart dans le TGV puis serveur saisonnier à la montagne, sans avoir fait la moindre rencontre dans le cinéma. « Paris je te quitte, mais je reviendrai », se jure t-il. De retour à Caen en 1993, il rencontre Sylvaine, son épouse, et poursuit sa quête artistique. Il fait des stages au « Papillon Noir Théâtre, avec le metteur en scène Charly Venturini. Il faut bien manger. Le couple fait bouillir la marmite en louant des vêtements.
« J’apprends le métier »
Un jour en lisant Casting Magazine, Yannick tombe sur une annonce de recherche de figurants. Il fait sa première figuration le 1er Avril 1993 pour le film « les enfants du faubourg ». Un premier cachet de 300 francs qu’il encadre et qu’il accroche dans son bureau. « Je me suis dit : ça y est, je suis dans le métier. A moi les grands réalisateurs ! je voulais travailler avec Lelouch. »
L’occasion ne tarde pas à se présenter. En 1994, Claude Lelouch recherche des figurants parlant allemand pour son film « les misérables ». Yannick ne parle pas un mot de la lange de Goethe mais l’envie d’approcher son idole est la plus forte. Il est accepté sans examen de langue et tourne des scènes à côtés de Jean-Paul Belmondo. Le même scénario se reproduit à Caen, avec la venue de la grande danseuse Guilhem. Un matin, il lit dans Ouest France que le maître de ballet recherche des danseurs pour figurer sur le plateau. Une heure plus tard, il est au théâtre. Trois heures plus tard, il est choisi parmi 40 prétendants pour la représentation du soir. Mais il ne sait pas danser. Tout l’après-midi, il répète les pas de danse, suant à grosses gouttes. Le beau cachet s’épuise vite. Yannick Dyvrande crée une brigade de serveurs et file au festival de Cannes, il foule le tapis rouge aux côtés des plus grands. Lelouch, encore lui, le retient pour une « fig » dans le film « Une fois pour toutes ». Hélas, la scène est coupée au montage. « J’apprends le métier », rage t-il en lui-même.
Son carnet d’adresses désormais bien rempli, Yannick court les tournages et enchaîne les téléfilms, « Joséphine, ange gardien », « Avocats et associés », « Commissaire Valence » et les films comme « Mister Bean » et « bienvenue chez les Ch’tis ». Il enfile l’habit de flic, facteur ou serveur avec aisance. « Aujourd’hui, je vis à peu près de ces tournages, avec des hauts et des bas. Je me dis que si je suis un acteur de complément, demain, je serais complètement acteur. »
Charles Dacher est un octogénaire encore alerte, malgré quelques douleurs par-ci par-là. On le croise en ville, ou à l’hypermarché du coin. Le disque dur fonctionne encore merveilleusement bien, surtout quand il s’agit de parler de sa jeunesse et de son engagement dans l’armée.
Insignes et photos étalées sur la table de sa salle à manger, il raconte. En 1944, Charles Dacher travaille déjà depuis quelques années aux chantiers navals de Blainville pour nourrir les siens. Il est l’aîné d’une famille de 12 enfants et son père s’est noyé accidentellement.
Il passe ses dimanches et ses jours de repos à faire du sport, tous les sports possibles que lui propose l’abbé Saint-Jean, curé de la paroisse et animateur de la jeunesse communale. La guerre fait rage. Charles supporte mal l’injustice. La rage au cœur, il décide d’en découdre avec l’ennemi et s’engage dans l’armée à 18 ans, pour la durée de la guerre.
« je suis entré dans la 2e DB, dirigée par le Général eclerc, qui venait d’arriver à Sainte-Marie-du-Mont. J’étais au 15e groupe d’escadrons de réparation des chars Sherman. J’y suis resté treize mois. J’en ai vu du pays ! Mais hélas, des cadavres aussi. »
Sa division fonce vers la Bretagne après la percée d’Avranches. Elle revient vers Sées qu’elle libère, contribue à la fermeture de la Poche de Falaise où la 7e armée allemande est anéantie.« Les filles nous sautaient au cou »
En accord avec le général de Gaulle, Leclerc est le premier à rentrer dans Paris. Charles a l’insigne honneur d’occuper le poste de mitrailleur sur le char du général. Le chasseur Dacher se souvient : « Paris était en liesse. Les filles nous sautaient au cou. Ce n’était pas désagréable, ma foi. » Son long voyage l’emmène ensuite en Bavière, après de durs combats en Alsace.
De retour à la vie civile, il travaille aux aciéries de Pompey, à Cormelles-le-Royal, et termine sa vie professionnelle à la « Radiotechnique » comme chef d’équipe. Il vient de fêter ses 60 ans de mariage avec Reine et 5 garçons sont nés de cette union. Tous sont officiers de Marine. « Nous en sommes très fiers ! », s’enorgueillit son épouse.
D’autres aventures ont parsemé l’existence de Charles Dacher. C’est lui qui a inauguré la rue du Général-Leclerc à Blainville, « en tremblant quant même un peu ». En mai 2008, il était présent à la remise de médailles au commando Kieffer, à Ouistreham, en présence de Nicolas Sarkosy. Dans la tribune officielle, il s’adresse à l’homme assis à sa gauche : « Vous êtes qui, vous ? », « Jean Marie Bockel, ministre des Anciens combattants. » Et à sa droite : « Amiral Xavier Rollin, commandant la flotte de l’Atlantique nord. » Charles se souvient : « Je suis rentré dans ma coquille et j’ai scruté l’horizon en évitant de regarder sur les côtés ! »